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Mercredi 4 décembre 2013
Construction participative des indicateurs de bien-être
Le processus de quantification de l’objet progrès social ou bien-être, se heurte à la fois à l’absence de fondement théorique et au risque récurrent de sa représentation par des catégories et cadres statistiques durcis par le temps et les représentations dominantes de la société et de l’action publique. Ceci peut expliquer le développement des démarches participatives en matière de construction d’indicateurs de bien-être.
Plusieurs questions peuvent être abordées. Dans quelle mesure ces démarches participatives constituent un biais ou un mode de révélation de valeurs et d’objectifs partagés ? Comment les registres scientifiques, politiques et éthiques peuvent-ils s’articuler ? Quels sont les conflits qui sont susceptibles d’émerger entre ces registres ?
Session 3 - Quel statut donner aux démarches participatives ?
La philosophie pragmatique de Dewey exprime bien toute la latitude et les enjeux liés à la mesure du bien-être : « Trouver une posture intellectuelle et les méthodes qui permettront de lier des pratiques scientifiques, des activités politiques qui s’en inspirent et la création de valeurs ». (Dewey J., 2005)
La démocratie n’est donc pas séparée de l’action et de la recherche. Dès lors, la question de la mesure du bien-être étant posée dans cette perspective sous l’angle de la connaissance scientifique et de l’aide à la décision, cela suppose de réussir à ne jamais déconnecter la science et ses méthodes, des savoirs de la société civile et des politiques publiques qui sont censées les représenter. Tout un programme ! Mais comment passer de ce vœu à la réalité pratique ?
Il peut être intéressant de comparer les registres de légitimation « scientifique » des méthodes d’enquête quantitative, qualitative et participative.
Session 4 - La construction du chiffre comme pratique démocratique
La construction des préférences individuelles et le statut à accorder à celles-ci soulèvent de multiples questions dans le cadre d’une démarche tournée vers l’élaboration d’une vision commune du bien-être ou du progrès social. Nombreux sont les travaux qui s’appuient sur des enquêtes quantitatives et qualitatives pour établir des corrélations entre des degrés de satisfaction individuelle exprimés et des déterminants individuels et sociaux. D. Meda et F. Jany- Catrice (2012) évoquent à leur propos combien « les indicateurs subjectifs ont envahi l’espace de production des jugements collectifs tout en faisant comme si les individus étaient dotés d’un stock initial de préférences individuelles qu’il s’agit simplement de faire s’exprimer». Pour prolonger cette critique il nous paraît judicieux de remettre en perspective la notion de préférence. Les préférences ne sont pas des notions objectives qui préexistent au niveau des individus mais ce sont des constructions sociales et le fait d’en discuter avec d’autres amène chacun à modifier ses préférences et à les construire comme objectif de politique publique.
Il nous paraît également important de mettre en débat la délicate question du passage du bien-être individuel à la formulation d’un intérêt collectif ou bien commun. Autrement dit, faut-il faire reposer la légitimité des démarches de construction d’indicateurs de bien-être sur la subjectivité des individus en prenant le double risque de passer à côté de la préservation du (des) bien (s) commun(s) et celui de développer une vision amorale, asociale et individualiste de l’individu déconnectée des enjeux d’inégalités, de soutenabilité des modes de vie, d’accès aux droits et de pouvoir d’agir ? (Gadrey ,.2012) Quelles articulations peut-on envisager entre ces différents modes d’expression du « bien » dans une perspective à la fois scientifique, politique et éthique ?
En quoi la mesure du bien-êtrepeut-elle pénétrer/infiltrer l’espace de définition et de construction des politiques publiques sectorielles ? En quoi peut-elle soutenir la construction de nouveaux modes de gouvernance territoriaux ?
Session 5 – Table ronde « Usage de la donnée, éthique et politique »
Quelques questions pour structurer la table ronde :
On abordera la valeur sociale du chiffre plutôt que la valeur d’usage (Ogien A., 2012 )
Comment ne pas évacuer l’altérité et la dimension éthico-politique de la condition humaine (Sobel/Postel 2010 ; Flahault, 2002, 2011 ; Meda/Jany-Catrice, 2012) ?
Quels sont les risques « réels » du basculement de la rationalité politique et stratégique en rationalité paramétrique (Orléans, 2007) ou substantielle (Simon, 1976) ?